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Le jour où la cathédrale a brûlé
1973. Peut-être avant. Ce serait facile à vérifier. Qu’importe. Disons que j’avais dans les 26 ans. Jérôme était tout petit. Il me semble qu’il marchait à peine. Ce serait très facile à vérifier.
Nous habitions en plein centre. L’époque bénie où l’on faisait tout à pied. Bien sûr c’était trop petit et Cécile disait que ça devenait impossible. Moi, je faisais la sourde oreille : je n’avais pas vraiment envie de bouger, je n’en voyais pas la nécessité. Il faut dire que je n’ai jamais eu l’esprit pratique. Bien sûr Cécile avait raison, à quatre c’était vraiment serré, mais ça ne me gênait pas. Non, ça ne me gênait pas ! Et pourtant, parfois, j’étouffais.
Ce qu’il y a, c’est qu’il n’y avait pas de problèmes pour sortir, vu qu’on était en pleine ville. Lorsque je n’en pouvais plus, je claquais la porte et j’étais tout de suite au centre de tout, c’était facile d’oublier. Seulement, je ne me rendais pas compte que j’avais quelque chose à oublier. Je ne voyais rien à l’époque, je ne me rendais compte de rien. Je ne voulais pas me rendre compte, je ne voyais même pas que j’étais égoïste. Quand je sortais, j’étais loin de me dire : je laisse Cécile et les deux enfants. En fait je ne me disais rien du tout. J’avais juste besoin de sortir. Je voyais juste que j’étais en train d’étouffer. Mais c’est sûr que je ne me disais rien du tout. Je ne savais même pas que j’avais quelque chose à me dire…