Nerfitheha | Clonerie

 

Performance Nerfitheha effectuée à Paris Belleville lors des festivals street art et littérauture Général Instin 2014 et 2015.

Clonerie | I

Ce matin je me suis réveillé(e) non dans mon assiette mais à côté de la plaque, un peu dégoûté(e), légèrement écœuré(e). Il me semblait que dans le sommeil ma conscience avait été empoisonnée et que ça venait même d’arriver, dans le sommeil paradoxal, le paradoxe étant que le poison consistait en mots doux—si je n’étais pas si farouche je vous dirais franchement que c’étaient des mots d’amour qu’on avait versé dans mes oreilles — et maintenant un sang nouveau coulait dans mes veines. En fait je n’étais plus moi-même, à vrai dire je m’avais oublié.
Je me levai et m’approchai du miroir pour voir la tête que j’avais. Je vis, je compris, je ne pouvais douter. Sur le miroir au rouge à lèvres était écrit en lettres majuscules INRI. Idole névrosée répertoire Instin. INRI.
C’était donc ça, un nouveau coup du général. Je me disais et répétais : C’est Instin si je ne m’abuse. Il n’y avait que lui pour me donner ainsi l’impression d’être manipulé(e) par le cousin de Shiva, d’être épié(e) par mille yeux, d’être vu(e) à la télé.
Je quittai le miroir et m’habillai comme Instin voulait que je m’habille. S’il n’avait tenu qu’à moi j’aurais mis autre chose croyez-moi, mais désormais j’appartenais à Instin, je ne tenais qu’à Instin, et j’étais prêt(e) à le servir comme il l’entendait, à devenir l’un(e) de ses groupies.
Une chanson me trottait dans la tête, en sortant de chez moi je la fredonnai : I wanna be loved by you just you and nobody else but you I wanna be loved by you alone pooh pooh be doo ! I wanna be kissed by you just you and nobody else but you I wanna be kissed by you alone…
Passé le coin de ma rue, je me sentis guidé(e). Instin me faisait marcher et il était bien le seul à savoir où j’allais. Soudain j’aperçus des grues puis des bulldozers, et peu après j’entrai dans une rue que l’on était en train de démolir. Je parvins ainsi à une terrasse de café. Tandis que je m’asseyais à une table trois autres s’assirent à mes côtés. A Paris on fait souvent d’étranges rencontres.
Tous les quatre à table nous nous sommes tout avoué : comment nous en étions arrivés là fut aussitôt multiplié par quatre, la puissance d’Instin s’en trouvait décuplée.
Je commandai un verre de gros-plant et je me mis à rêver, à utopier, à faire un château en Espagne, à voir mon nom dans wiki. C’était évident, Instin allait faire quelque chose de moi. A nous quatre nous avons défait et refait le monde puis chacun est parti de son côté. Je glissais sur un nuage. L’amour était devenu mon crédo. J’étais déterminé(e) à apporter de l’amour à tout le monde. J’étais déterminé(e) à aller jusqu’au bout et à l’autre et à les joindre ensemble pour que le monde puisse enfin tourner rond. Dans ma caboche l’espoir a lui et pour une fois j’étais déterminé(e) à suivre mon étoile. J’avais trouvé, je deviendrai une star. A big star in the sky of celebrity!
J’allais taper dans le mille, devenir la cible des regards. Norma Desmond n’aura plus qu’à aller se rhabiller, le public n’attendra plus que moi. Je me confondrai d’amour pour mes admirateurs qui me le rendront au centuple, en flashs, en applaudissements, en tentatives de suicide, ah je les vois déjà pour moi se jeter des fenêtres ! Et quand ils seront tombés à mes pieds je propagerai la bonne nouvelle : Instin est là, Instin est par dessus les toits, le règne d’Instin commence, l’amour va déferler sur le monde !
Mais soudain —qu’avais-je dit ? qu’avais-je fait ?— plus rien, Instin n’était plus en moi. Soudain je ne sentis plus Instin —l’avais-je déçu ? l’avais-je trahi ?— je redescendis de mon nuage, il n’y avait plus personne pour  guider mes pas. Je me sentis seul(e) soudain, mais alors seul(e) comme je ne l’avais jamais été, réduit(e) à rien. Je faillis trébucher. Mon système solaire se réduisait soudain à une peau de chagrin.
Ok, Mr de Mille, je suis prêt(e) pour mon gros-plan.
Instin, Instin, pourquoi m’as-tu abandonné(e) ?

Clonerie | II

 

Ce matin je me suis réveillé(e) non dans mon assiette mais à côté de la plaque, un peu dégoûté(e), légèrement écœuré(e). Il me semblait que dans le sommeil ma conscience avait été empoisonnée et que ça venait même d’arriver, dans le sommeil paradoxal, le paradoxe étant que le poison consistait en mots doux—si je n’étais pas si pudique je vous dirais franchement que c’étaient des mots d’amour qu’on avait versé dans mes oreilles — et maintenant un sang nouveau coulait dans mes veines. En fait je n’étais plus moi-même, à vrai dire je m’avais oublié.
Je me levai et m’approchai du miroir pour voir la tête que j’avais. Je vis, je compris, je ne pouvais douter. Sur le miroir au rouge à lèvres était écrit en lettres majuscules INRI. Inconsciente nymphomane racolage Instin. INRI.
C’était donc ça, un nouveau coup du général. Je me disais et répétais : C’est Instin si je ne m’abuse. Il n’y avait que lui pour me donner ainsi l’impression d’être manipulé(e) par le cousin de Shiva, d’être épié(e) par mille yeux, d’être vu(e) à la télé.
Je quittai le miroir et m’habillai comme Instin voulait que je m’habille. S’il n’avait tenu qu’à moi j’aurais mis autre chose croyez-moi, mais désormais j’appartenais à Instin, je ne tenais qu’à Instin, et j’étais prêt(e) à le servir comme il l’entendait, à devenir l’un(e) de ses filles.
Une chanson me trottait dans la tête, en sortant de chez moi je la fredonnai : C’est fou c’que j’peux t’aimer c’que j’peux t’aimer des fois des fois j’voudrais crier car j’n’ai jamais aimé jamais aimé comme ça ça je peux t’le jurer si jamais tu partais partais et me quittais me quittais pour toujours c’est sûr que j’en mourrais que j’en mourrais d’amour mon amour mon amour…
Passé le coin de ma rue, je me sentis guidé(e). Instin me faisait marcher et il était bien le seul à savoir où j’allais. Soudain j’aperçus des grues puis des bulldozers, et peu après j’entrai dans une rue que l’on était en train de démolir. Je parvins ainsi à une terrasse de café. Tandis que je m’asseyais à une table trois autres s’assirent à mes côtés. A Paris on fait souvent d’étranges rencontres.
Tous les quatre à table nous nous sommes tout avoué : comment nous en étions arrivés là fut aussitôt multiplié par quatre, la puissance d’Instin s’en trouvait décuplée.
Je commandai un verre d’absinthe et je me mis à rêver, à utopier, à faire un château en Espagne, à voir mon nom dans wiki. C’était évident, Instin allait faire quelque chose de moi. A nous quatre nous avons défait et refait le monde puis chacun est parti de son côté. Je glissais sur un nuage. L’amour était devenu mon crédo. J’étais déterminé(e) à apporter de l’amour à tout le monde. J’étais déterminé(e) à aller jusqu’au bout et à l’autre et à les joindre ensemble pour que le monde puisse enfin tourner rond. Dans ma caboche l’espoir a lui et pour une fois j’étais déterminé(e) à suivre mon étoile. J’avais trouvé, je deviendrai une putain, la putain d’Instin. On peut bien dire de moi j’te ferai n’importe quoi si tu me le demandais !
J’allais baiser absolument tout le monde. Tous les styles, tous les genres. Soutenue par Instin sûr que je ferais n’importe quoi ! Je renierais ma patrie, j’insulterais ma famille, je quitterais mon travail. Pour baiser jusqu’au bout du monde. Pour m’envoyer en l’air à en décrocher la lune. In sex I trust and money is what I want.
Et quand je les aurai bien baisés je propagerai la bonne nouvelle : Instin est là, Instin est par dessus les toits, le règne d’Instin commence, l’amour va déferler sur le monde !
Mais soudain —qu’avais-je dit ? qu’avais-je fait ?— plus rien, Instin n’était plus en moi. Soudain je ne sentis plus Instin —l’avais-je déçu ? l’avais-je trahi ?— je redescendis de mon nuage, il n’y avait plus personne pour guider mes pas. Je me sentis seul(e) soudain, mais alors seul(e) comme je ne l’avais jamais été, réduit(e) à rien. Je faillis trébucher. Mon système solaire se réduisait soudain à une peau de chagrin.
Tu es si loin de moi que peu m’importe de mourir.
Instin, Instin, pourquoi m’as-tu abandonné(e) ?

Clonerie | III

 

Ce matin je me suis réveillé(e) non dans mon assiette mais à côté de la plaque, un peu dégoûté(e), légèrement écœuré(e). Il me semblait que dans le sommeil ma conscience avait été empoisonnée et que ça venait même d’arriver, dans le sommeil paradoxal, le paradoxe étant que le poison consistait en mots doux—si je n’étais pas si coincé(e) je vous dirais franchement que c’étaient des mots d’amour qu’on avait versé dans mes oreilles — et maintenant un sang nouveau coulait dans mes veines. En fait je n’étais plus moi-même, à vrai dire je m’avais oublié.
Je me levai et m’approchai du miroir pour voir la tête que j’avais. Je vis, je compris, je ne pouvais douter. Sur le miroir au rouge à lèvres était écrit en lettres majuscules INRI. Imposteur nabi rédemption Instin. INRI.
C’était donc ça, un nouveau coup du général. Je me disais et répétais : C’est Instin si je ne m’abuse. Il n’y avait que lui pour me donner ainsi l’impression d’être manipulé(e) par le cousin de Shiva, d’être épié(e) par mille yeux, d’être vu(e) à la télé.
Je quittai le miroir et m’habillai comme Instin voulait que je m’habille. S’il n’avait tenu qu’à moi j’aurais mis autre chose croyez-moi, mais désormais j’appartenais à Instin, je ne tenais qu’à Instin, et j’étais prêt(e) à le servir comme il l’entendait, à devenir l’un(e) de ses disciples.
Une chanson me trottait dans la tête, en sortant de chez moi je la fredonnai : Alouette gentille alouette alouette je te plumerai je te plumerai la tête je te plumerai la tête et la tête et la tête alouette alouette aaah alouette gentille alouette alouette je te plumerai.
Passé le coin de ma rue, je me sentis guidé(e). Instin me faisait marcher et il était bien le seul à savoir où j’allais. Soudain j’aperçus des grues puis des bulldozers, et peu après j’entrai dans une rue que l’on était en train de démolir. Je parvins ainsi à une terrasse de café. Tandis que je m’asseyais à une table trois autres s’assirent à mes côtés. A Paris on fait souvent d’étranges rencontres.
Tous les quatre à table nous nous sommes tout avoué : comment nous en étions arrivés là fut aussitôt multiplié par quatre, la puissance d’Instin s’en trouvait décuplée.
Je commandai un verre de gros rouge qui tâche et je me mis à rêver, à utopier, à faire un château en Espagne, à voir mon nom dans wiki. C’était évident, Instin allait faire quelque chose de moi. A nous quatre nous avons défait et refait le monde puis chacun est parti de son côté. Je glissais sur un nuage. L’amour était devenu mon crédo. J’étais déterminé(e) à apporter de l’amour à tout le monde. J’étais déterminé(e) à aller jusqu’au bout et à l’autre et à les joindre ensemble pour que le monde puisse enfin tourner rond. Dans ma caboche l’espoir a lui et pour une fois j’étais déterminé(e) à suivre mon étoile. J’avais trouvé, je deviendrai un(e) martyr(e). Un(e) martyr(e) on the mountain entre deux larrons enfouarés.
Et je dirai à tous : ne pleurez pas, voyez l’alouette qui monte au ciel, c’est le jour qui se lève, c’est demain qui commence et demain sera différent. Non, ce n’est pas le rossignol mais l’alouette, c’est l’aurore et non le crépuscule. Voici la fin de l’obscur, la mort des anciennes idoles, le renversement des vieilles bonnes valeurs.
Et quand ils ne sauront plus à quel saint se vouer je propagerai la bonne nouvelle : Instin est là, Instin est par dessus les toits, le règne d’Instin commence, l’amour va déferler sur le monde !
Mais soudain —qu’avais-je dit ? qu’avais-je fait ?— plus rien, Instin n’était plus en moi. Soudain je ne sentis plus Instin —l’avais-je déçu ? l’avais-je trahi ?— je redescendis de mon nuage, il n’y avait plus personne pour guider mes pas. Je me sentis seul(e) soudain, mais alors seul(e) comme je ne l’avais jamais été, réduit(e) à rien. Je faillis trébucher. Mon système solaire se réduisait soudain à une peau de chagrin.
C’était le rossignol. C’était le crépuscule.
Instin, Instin, pourquoi m’as-tu abandonné(e) ?

Clonerie | IV

 

Ce matin je me suis réveillé(e) non dans mon assiette mais à côté de la plaque, un peu dégoûté(e), légèrement écœuré(e). Il me semblait que dans le sommeil ma conscience avait été empoisonnée et que ça venait même d’arriver, dans le sommeil paradoxal, le paradoxe étant que le poison consistait en mots doux—si je n’étais pas si pusillanime je vous dirais franchement que c’étaient des mots d’amour qu’on avait versé dans mes oreilles — et maintenant un sang nouveau coulait dans mes veines. En fait je n’étais plus moi-même, à vrai dire je m’avais oublié.
Je me levai et m’approchai du miroir pour voir la tête que j’avais. Je vis, je compris, je ne pouvais douter. Sur le miroir au rouge à lèvres était écrit en lettres majuscules INRI. Illuminé nomade randonnée Instin. INRI.
C’était donc ça, un nouveau coup du général. Je me disais et répétais : C’est Instin si je ne m’abuse. Il n’y avait que lui pour me donner ainsi l’impression d’être manipulé(e) par le cousin de Shiva, d’être épié(e) par mille yeux, d’être vu(e) à la télé.
Je quittai le miroir et m’habillai comme Instin voulait que je m’habille. S’il n’avait tenu qu’à moi j’aurais mis autre chose croyez-moi, mais désormais j’appartenais à Instin, je ne tenais qu’à Instin, et j’étais prêt(e) à le servir comme il l’entendait, à devenir l’un(e) de ses messagers.
Une chanson me trottait dans la tête, en sortant de chez moi je la fredonnai : Général, nous voilà devant toi le sauveur de la France nous jurons nous tes gars de servir et de suivre tes pas général nous voilà tu nous a redonné l’espérance la Patrie renaîtra général général nous voilà !
Passé le coin de ma rue, je me sentis guidé(e). Instin me faisait marcher et il était bien le seul à savoir où j’allais. Soudain j’aperçus des grues puis des bulldozers, et peu après j’entrai dans une rue que l’on était en train de démolir. Je parvins ainsi à une terrasse de café. Tandis que je m’asseyais à une table trois autres s’assirent à mes côtés. A Paris on fait souvent d’étranges rencontres.
Tous les quatre à table nous nous sommes tout avoué : comment nous en étions arrivés là fut aussitôt multiplié par quatre, la puissance d’Instin s’en trouvait décuplée.
Je commandai un verre de gin et je me mis à rêver, à utopier, à faire un château en Espagne, à voir mon nom dans wiki. C’était évident, Instin allait faire quelque chose de moi. A nous quatre nous avons défait et refait le monde puis chacun est parti de son côté. Je glissais sur un nuage. L’amour était devenu mon crédo. J’étais déterminé(e) à apporter de l’amour à tout le monde. J’étais déterminé(e) à aller jusqu’au bout et à l’autre et à les joindre ensemble pour que le monde puisse enfin tourner rond. Dans ma caboche l’espoir a lui et pour une fois j’étais déterminé(e) à suivre mon étoile. J’avais trouvé, je deviendrai un roi mage. Non, un(e) apôtre(sse). Non, un(e) globe-trotter.
Je m’en irai les poings dans les poches de mon jean serré, mon sac à dos deviendra idéal. Oh là là, à chaque étape les gens seront là pour me voir défiler! Les gens, ils n’entendront que le bruit de mes pas sur la route, le martèlement qui résonne, qui entête, le choc des talons qui dicte la voie. Un esprit sain dans un corps sain. Suivez-moi !
Et quand j’aurai usé mes souliers je propagerai la bonne nouvelle : Instin est là, Instin est par dessus les toits, le règne d’Instin commence, l’amour va déferler sur le monde !
Mais soudain —qu’avais-je dit ? qu’avais-je fait ?— plus rien, Instin n’était plus en moi. Soudain je ne sentis plus Instin —l’avais-je déçu ? l’avais-je trahi ?— je redescendis de mon nuage, il n’y avait plus personne pour guider mes pas. Je me sentis seul(e) soudain, mais alors seul(e) comme je ne l’avais jamais été, réduit(e) à rien. Je faillis trébucher. Mon système solaire se réduisait soudain à une peau de chagrin.
Les étoiles au ciel ne faisaient plus frou-frou.
Instin, Instin, pourquoi m’as-tu abandonné(e) ?